L’Invisible Madame Orwell – Anna Funder
Roman étrangerAuteur : Anna Funder
Traduit de l’anglais (Australie) par Carine Chichereau
Titre original : Wifedom: Mrs. Orwell’s Invisible Life
Nombre de pages : 496
Éditions Héloïse d’Ormesson (5 septembre 2024)
Une femme dans l’ombre d’un génie littéraire
George Orwell, l’auteur du mythique 1984, est un personnage qui fascine l’autrice, Anna Funder. Alors qu’elle est submergée par son quotidien familial, Anna Funder déniche une biographie de Georges Orwell. Puis une autre et encore une autre. De livres en livres, elle découvre un pan méconnu de son histoire : la vie d’Eileen, l’épouse avec laquelle il s’est marié en 1936. Une femme hors du commun qui aurait vécu dans l’ombre de son mari. C’est alors que Anna Funder réalise qu’au-delà de ne pas la mentionner, toutes les biographies officielles de l’auteur auraient volontairement effacée l’histoire de cette femme brillante et engagée au profit d’un mythe : son héros de mari.
En 2005, des lettres qu’Eileen adressait à sa meilleure amie Norah entre 1936 et 1945 sont retrouvées. À travers ces écrits, retranscrits en partie dans le livre, émerge une femme qui, tout en soutenant son mari dans ses projets littéraires, révèle un talent de conteuse et une personnalité marquante.
Un livre à deux histoires imbriquées
Ce livre est très original. Car il entremêle la vie du sujet principal, Eileen, et celle de la narratrice – l’autrice elle-même. Malgré les décennies qui les séparent, les similitudes sont troublantes. Qu’il s’agisse des luttes pour la reconnaissance ou des sacrifices invisibles consentis par les femmes, le livre interroge sur l’évolution (ou non) de la condition féminine. Avons-nous réellement progressé, ou certains combats demeurent-ils inchangés ? Et pourquoi devrions-nous toujours nous battre pour nous faire entendre, ou exister ?
Un écrivain, et après ?
Dans ce livre, grâce aux recherches d’Anna Funder et aux lettres d’Eileen écrites à Norah, on découvre également la personnalité complexe d’Orwell. Un écrivain brillant, mais fragile, entièrement soutenu par Eileen, qui assumait l’intendance pour lui permettre d’écrire. Du mariage du couple dans la campagne anglaise à leur vie dans un Londres sous les bombes, en passant par la guerre civile espagnole, le livre dévoile une relation où les ambitions littéraires d’Orwell semblaient primer sur tout le reste.
Anna Funder est une fine observatrice. Et elle a en plus une belle capacité à s’exprimer par les mots qu’elle choisit avec finesse. Elle signe ici une œuvre richement documentée (avec pas moins de 40 pages de notes en fin d’ouvrage !) qui réhabilite une figure trop longtemps ignorée. Son style incisif et délicat rend justice à cette femme exceptionnelle et nous pousse à réfléchir sur les silences de l’Histoire. Un livre passionnant qui redonne vie à l’invisible !
Présentation de l’éditeur. Merci aux Éditions Héloïse d’Ormesson pour la lecture de ce roman phénomène.
A propos de l’autrice : née en 1966, Anna Funder a grandi entre Melbourne, Paris et San Francisco. Avocate internationale pour le gouvernement australien, elle abandonne sa carrière pour écrire son premier roman et devient productrice radio et télé. Best-seller publié dans 24 pays, Stasiland (EHO, 2008 et repris en 10/18) a été primé par le prestigieux BBC Samuel Jonhson Prize. Elle vit aujourd’hui à Sydney avec son mari et ses trois enfants.
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