Laëtitia – Ivan Jablonka
Document/essaiAuteur : Ivan Jablonka
Genre : Littérature française
Nombre de pages : 400
Editeur : Éditions du Seuil (25 août 2016)
Le 19 janvier 2011, Jessica sort de la maison pour aller prendre son bus de ramassage scolaire lorsqu’elle aperçoit dans le fossé le scooter et deux ballerines noires de sa sœur jumelle, Laëtitia.
Laëtitia Perrais.
Celle dont l’enlèvement, la séquestration, le viol et le meurtre ont fait la une des médias en ce début d’année 2011, ou comment un fait divers s’est transformé en affaire d’Etat sous la Présidence de Nicolas Sarkozy.
Ce livre est l’un des deux documents/essais lus dans le cadre du Grand Prix des Lectrices ELLE.
Sur la surcouverture noire, seul un prénom annonce le titre écrit en lettres rouges : Laëtitia. Mais sur la couverture du roman en lui-même il est écrit «Laëtitia ou la fin des hommes». Maintenant que j’ai lu le livre, je comprends mieux son titre même si je n’avais pas saisi cette nuance avant de l’entamer.
L’ouvrage d’Ivan Jablonka est l’aboutissement d’un long et minutieux travail d’investigation. L’auteur n’a pas connu Laëtitia mais il a rencontré ses proches et les acteurs au cœur de l’enquête. Les chapitres alternent entre la restitution des faits de la nuit du drame avec une précision extrême, et les événements qui ont suivi. Ainsi, vous vivrez avec les enquêteurs l’angoisse de la découverte du corps (et l’espoir de la retrouver vivante qui s’amenuise peu à peu), les aveux de son ravisseur, ses mensonges aussi, le procès qui a eu lieu en 2015 et ses conclusions.
Mais l’auteur s’attache aussi aux (sur)vivants et notamment à Jessica, sa sœur jumelle. A partir de ce constat : (je cite) la gémellité est un équilibre infiniment subtil, sans la « faible», la «forte» se retrouve perdue, on comprend combien ce qui est arrivé à Laëtitia a eu des effets sur sa sœur. Et c’est en fait la vie entière de ces deux sœurs que nous retrace Ivan Jablonka. Nées sous une mauvaise étoile, maltraitées par leurs parents qui les élevaient dans la peur, elles sont placées en famille d’accueil mais malheureusement quelques mois après le décès de Laëtitia, Jessica révèle les attouchements sexuels du père de famille et porte plainte pour viol (il a été jugé depuis, il est en prison désormais). Une vie de violences aux effets dévastateurs dans laquelle les femmes sont battues, violées, harcelées ou tuées par des hommes.
« L’affaire Laëtitia » révèle aussi les dysfonctionnements de la justice française, durablement affaiblie par le manque de ressources et les paroles du chef de l’Etat qui a reproché aux juges de ne pas avoir mieux suivi ce délinquant sexuel multirécidiviste. Le livre porte sur un pays, une société, une justice et le sentiment d’injustice qui a enclenché un mouvement des magistrats qui se sont mis en grève.
Qu’il est difficile de chroniquer un livre pareil en quelques lignes. Je voudrais juste vous dire combien il est riche et documenté, terriblement bien écrit. Certes c’est un sujet lourd et difficile mais il mérite d’être lu, rien que pour une raison : rendre sa dignité à Laëtitia, la voir comme la jeune femme qu’elle était et autrement qu’en fait divers. C’est du grand travail.
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Citation :
Aucune société, fût-elle totalitaire, ne peut éradiquer le crime. Le mal, le désir de transgression, l’envie, la folie étant constitutifs de l’espère humaine, le risque zéro n’existe pas.
Présentation du roman disponible aux Éditions du Seuil
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A propos de l’auteur :
Ivan Jablonka, ancien élève de l’École normale supérieure, agrégé d’histoire, est maître de conférences à l’université du Maine. Il a notamment publié Les Vérités inavouables de Jean Genet (Seuil, collection «XXe siècle», 2004), Ni père ni mère (Seuil, collection «XXème siècle», 2006) et Enfants en exil (Seuil, septembre 2007).
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