
L’administrateur provisoire – Alexandre Seurat
Littérature françaiseAuteur : Alexandre Seurat
Genre : Littérature française
Nombre de pages : 192
Editeur : Le Rouergue (17 août 2016)
Peu après le décès de son frère, le narrateur apprend par son oncle certaines particularités de la famille : son arrière-grand-père, un certain Raoul H., aurait collaboré avec les Allemands pendant la seconde guerre mondiale. Sous couvert de faire libérer son fils, il a fait partie du Commissariat général aux questions juives.
Je remercie chaleureusement les Editions du Rouergue pour la découverte du deuxième roman d’Alexandre Seurat (dont j’avais beaucoup entendu parler grâce à son 1er : La maladroite).
Qu’est-ce qu’un administrateur provisoire ? Avant de lire ce roman, je ne savais pas précisément répondre à cette question. Maintenant oui.
Une fois le secret de famille éventé, le narrateur entame, bien malgré lui, des recherches. Dans un premier temps auprès de ses proches, mais dans une famille bourgeoise où chacun économie ses paroles et où les rapports sont quasi inexistants, les non-dits sont rois. Alors, il se tourne vers un historien spécialiste de la seconde guerre mondiale qui l’oriente vers les Archives nationales où sont consignées toutes les actions menées par le Commissariat général aux questions juives.
Au fur et à mesure de ses recherches, il comprend que son grand-père fut en effet l’un des administrateurs provisoires sous Vichy, ces hommes qui avaient pour travail de recenser les entreprises détenues par des juifs, de les placer sous contrôle du Commissariat (les confisquer donc), avant de forcer la vente. Le produit de la vente était au départ bloqué sur un compte à la Caisse des dépôts et des consignations afin de s’assurer que le capital juif est sous contrôle. Mais, avec les années qui passent et les rafles, «la Caisse des dépôts et consignations était devenue, après la guerre, comme un immense cimetière».
Il faut donc distinguer la spoliation (le vol légal) du pillage – car à l’époque, spolier est un travail (Article 7 – l’administrateur provisoire doit gérer en bon père de famille.)
Récit historique sous forme de documentaire et d’enquête familiale, ce livre est entrecoupé de chapitres extraits d’un procès jugeant des crimes longtemps passés sous silence (antisémitisme, persécution, menace, chantage, exploitation de personnes jusqu’à la déportation pouvant entrainer la mort, et ce dans la plus grande indifférence).
De secrets bien gardés en atrocités inavouées (cautionnés par un travail bien fait), avec son Administrateur provisoire, Alexandre Seurat sait trouver les mots justes pour nous sensibiliser sur notre devoir de mémoire. Un témoignage pointu et bouleversant. Une plume sensible et parfaitement formulée, très agréable à lire.
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Présentation du roman chez Le Rouergue
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A propos de l’auteur :
Né en 1979, Alexandre Seurat est professeur de lettres à Angers. Il a soutenu en 2010 une thèse de Littérature générale et comparée. Il est l’auteur d’un premier roman très remarqué, La maladroite.
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