Défense légitime – Véronique Sousset
Document/essaiAuteur : Véronique Sousset
Genre : Document
Nombre de pages : 144
Editeur : Le Rouergue (1er février 2017)
Véronique Sousset est avocate, commise d’office dans un horrible fait divers : celui de la mort d’une enfant sous les coups de ses parents.
La première avocate ayant renoncé à défendre cet homme que l’opinion publique considère comme un monstre, Véronique Sousset l’accepte comme un défi, sans condition ni concession.
Un soir, frappant plus fort, vous donnez la mort à votre fille comme on donne l’extrême-onction à une condamnée à vie. Elle est née morte et sera sacrifiée tant que son cœur, seul organe que vous ne pourrez atteindre, battra. Il va s’épuiser avec son vœu d’être comme les autres enfants, aimé.
Je remercie les Éditions du Rouergue pour la découverte de ce premier titre d’une collection de récits et documents au sein de la Brune.
Moi qui ai toujours beaucoup aimé la fiction, je découvre et j’apprécie de plus en plus les récits de vie. Même si la réalité du vécu est parfois plus bien complexe à comprendre.
Ici, j’ai découvert avec un plaisir (si tant est que je puisse utiliser ce terme compte tenu du sujet du livre…) non dissimulé l’écriture de Véronique Sousset qui utilise les mots justes pour exprimer son ressenti.
Pas de fioritures, pas de sensiblerie, juste des faits. Relatés dans un français fourni et pointu qu’il est très appréciable de lire. D’autant que, malgré la gravité du sujet, l’auteure joue avec les mots qu’elle manie à la perfection.
Il m’est d’ailleurs arrivé plusieurs fois de chercher la signification d’un mot dans le dictionnaire (Connaissez-vous le «mitan» ? Savez-vous ce qu’est l’«ire» ? L’«antienne» ?… Ce ne sont que des exemples mais ces mots sont utilisés à bon escient car ils ont une signification particulière).
J’ai donc dû entendre l’inaudible, vous avez dû dire l’indicible.
Entièrement écrit à la première personne du singulier, puisque l’auteure elle-même raconte l’histoire qu’elle a vécue, le «vous» représente quant à lui l’homme qu’elle défend. L’utilisation de ces pronoms crée un univers très intimiste.
Sur le fond, il est très difficile de se prononcer car Véronique Sousset a la lourde tâche de défendre un homme indéfendable. Mais justement, quelle que soit l’atrocité de son acte et même s’il l’avoue, tout homme n’a-t-il pas le droit à un procès ? L’auteure fait partie de ceux qui répondent oui à cette question. Malgré l’horreur des faits, malgré l’épouvantable reconstitution, malgré les regards accusateurs de l'opinion publique…
Souvent, au cours des rencontres suivantes, comme tout avocat, je vous invite à ne rien omettre pour me permettre de vous défendre. Heureusement, vous n’entendez pas cette injonction paradoxale quand mes silences au contraire vous conjurent de le faire.
Défense légitime est un récit bouleversant dans lequel l’auteure se confie, sans filtre.
Au cœur d’une affaire indéfendable, sur le chemin de l’horreur, elle puise dans le plus profond de son être pour donner un sens au métier qu’elle exerce, ainsi que, plus généralement, à la vie. En tant que femme, je me demande vraiment comment elle a pu faire pour passer outre les préjugés et la violence des faits reprochés à son client. Je pense que l’aplomb dont elle a dû faire preuve tout au long de l’instruction et du procès n’est pas donné à tout le monde.
Défense légitime est un ouvrage à mon sens nécessaire.
A lire absolument !
La perpétuité, c’est le désespoir programmé.
De mon expérience, je peux modestement vous livrer ce constat : la peine est comme une échelle, à chaque barreau un seuil, un palier, une année de plus est parfois une année de trop. C’est donc aussi tout le sens de la juste peine, car gardons-nous de chercher une peine juste, elle l’existe pas pour répondre à la mort d’un enfant.
Le crime a placé mon client hors de la considération sociale. La peine que vous prononcerez doit l’y réintégrer et faire mentir le désespoir.
Présentation du roman aux Editions Le Rouergue
A propos de l’auteur :
Véronique Sousset est née en 1973 à Quimper. Après des études de droit, elle intègre l’ENAP (École Nationale d'Administration Pénitentiaire), avant d'entamer une carrière, de Caen à Brest, puis Rennes. En 2008, elle se met en disponibilité pour exercer le métier d’avocat pendant quatre ans. Après cette expérience, elle réintègre le ministère de la Justice. Elle est aujourd’hui directrice d'un établissement pénitentiaire.
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